Publications de l’UNESCO relatives à l’apprentissage mobile (2012-2013)

Plusieurs séries de publications ont été réalisées pour « mieux comprendre comment on peut utiliser les technologies mobiles pour améliorer l’accès à l’éducation, l’équité et la qualité des services éducatifs à travers le monde » : nous présentons ici des synthèses d’une sélection de ces publications.

L’apprentissage mobile : implications pour la planification de politiques (2013)

UNESCO. (2013a). L’avenir de l’apprentissage mobile : implications pour la planification de politiques.
Consulté le 03/01/14, à l’adresse :
http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002196/219637f.pdf

Ce document fait partie d’une série sur les technologies éducatives publiée entre 2012 et 2013. Elle se divise en deux parties : six publications s’attachent à analyser l’impact des initiatives d’apprentissage mobile notamment en termes politiques, les six autres réfléchissent à l’apport des technologies à la pratique des enseignants. La série permet une vision globale des efforts en cours de par le monde, et formule des recommandations et des analyses à la lumière des objectifs du programme de l’Éducation Pour Tous (EPT).

La tendance actuelle est la baisse des prix des technologies, qui les rend plus accessibles. Cependant, les technologies en elle-mêmes ne favorisent pas l’apprentissage. Elles doivent s’insérer dans « la trame sociale et culturelle des communautés ». De nombreuses initiatives ont  eu pour objectif l’augmentation de l’accès aux technologies plutôt que la formation des acteurs (enseignants, élèves, encadrants) à leur utilisation pour l’amélioration de l’apprentissage. Dans les systèmes formels d’éducation, les programmes ont pris différentes formes1. De nouvelles formes d’apprentissage peuvent être encouragées grâce aux technologies mobiles mais c’est surtout à travers l’élaboration d’une offre adaptée aux publics cibles que des avancées pourront se faire.

Des espoirs sont formulés vis-à-vis des technologies qui permettraient de stabiliser les coûts de l’éducation en constante augmentation du fait de la massification de l’école ; l’apprentissage mobile et en ligne permettrait également d’accueillir des publics en marge du secteur formel pour des raisons « physiques, sociales ou économiques »2. Cependant, la représentation négative attachée aux TIC reste un obstacle important à leur implémentation en classe. Les expérimentations de courte durée, mal planifiées, couplées au manque de formation des enseignants ainsi qu’au manque de financements stables ont dans de nombreux cas engendré une absence d’impact, voire un impact négatif, sur les apprentissages et les pratiques. L’adoption des technologies par les enseignants est ainsi primordiale à leur bonne intégration.

Le marché de l’éducation devient de plus en plus attractif, en particulier pour les acteurs privés, ce qui a une influence sur les investissements dans le secteur. Les auteurs mettent en garde contre une trop forte dépendance de l’apprentissage mobile au marché, soulignant que les décideurs devront trouver le moyen de concilier la logique du marché avec le mandat de justice sociale promu par l’Éducation pour tous (p.33). Bien qu’il semble primordial de construire des partenariats multi-sectoriels, les auteurs soulignent fortement que « la rentabilité ne doit pas être la principale motivation de ces investissements » (p. 39). Pour cela, une perspective « analytique de l’apprentissage mobile » basée sur la recherche et les théories de la connaissances et de l’apprentissage devrait être aménagée.

Cette approche permettrait de « construire une image plus complète et plus nuancée de l’apprentissage mobile ». La formation des enseignants ainsi que la sensibilisation des différents acteurs des systèmes éducatifs – apprenants compris – devraient également être développées. Enfin, cette promotion des développements des apprentissages mobiles devrait se faire dans un esprit de parité : ils devraient donc être, dans la mesure du possible, subventionnés pour ne pas faire de certaines populations des laissés pour compte.

Synthèse : JTT

Principes directeurs de l’UNESCO pour l’apprentissage mobile (2013)

UNESCO. (Éd.). (2013b). Principes directeurs de l’UNESCO pour l’apprentissage mobile.
Consulté le 03/01/14, à l’adresse :
http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002196/219661f.pdf

Le document s’attache à formuler des recommandations aux politiques après avoir mis en lumière les différents atouts que l’apprentissage mobile peut représenter ainsi que les principes qui devraient guider l’élaboration des politiques. Le document se structure en deux parties, l’une se focalisant sur les apport possibles de l’apprentissage mobile, l’autre sur les principes généraux qui devraient guider les prises de décision concernant le développement des technologies.

Au plan de l’amélioration des pratiques pédagogiques, les apprentissages mobiles sont présentés comme facilitateurs pour un apprentissage personnalisé : avec la baisse des coûts des technologies mobiles, les apprenants seront de plus en plus à même de posséder leur propre outil : leçons, exercices et suivi pourront ainsi s’adapter davantage au niveau et rythme de l’apprenant ; ils pourront également prendre des formes variées et différentes selon les apprenants. Ces technologies peuvent permettre la transmission des concepts en amont du temps « en classe », à travers des activités passives (écoute, mémorisation) que les apprenants peuvent accomplir chez eux, permettant de privilégier « les aspects sociaux de l’apprentissage » pendant le temps passé à l’école (débat, application des concepts, discussions, travaux de groupe). De plus, les technologies mobiles permettent, à travers les plateformes et services qu’elles créent, de diriger les personnes sur des activités et des projets collaboratifs.

Bien qu’il y ait un manque d’analyse coût-bénéfices sur le long terme, les TIC peuvent contribuer à une réduction des coûts liés au renouvellement des ressources pédagogiques (manuels, cahiers d’exercice…). L’utilisation du téléphone portable dans le cadre du travail scolaire permettrait aux enseignants, encadrants et apprenants d’échanger sur les aspects organisationnels et pédagogiques. Les technologies mobiles permettent également aux apprenants d’avoir accès à des ressources complémentaires en ligne pour clarifier des notions vues en classe.

Au plan des préconisations relatives aux prises de décisions, la création de ressources adaptées aux contexte et langue locaux est signalée comme un point important à être encourager afin que l’accès de tous à l’éducation soit garanti. La planification de diffusion des TIC devrait se faire dans l’optique de réduire la fracture numérique entre hommes et femmes ainsi qu’entre habitants des milieux ruraux et urbains. De plus, de par son lien direct avec le développement économique et social, l’accès à l’information devrait être encouragé par l’investissement des gouvernements dans les infrastructures technologiques. Actuellement, trois moyens permettent d’assurer que tous disposent du matériel nécessaire à l’apprentissage mobile : les gouvernements assurent la dotation des écoles ; les apprenants apportent leurs propres matériel ; les gouvernements et les familles partagent les coûts de fourniture.

Une sensibilisation est jugée nécessaire à la surconsommation et la cyberdépendance. D’autre part, des « risques sanitaires potentiels » associés à l’usage des TIC soulèvent des inquiétudes ; ils devraient continuer d’être pris en compte par des recherches. Historiquement vues comme une source de distraction, les technologies mobiles provoquent méfiance et rejet de la part des acteurs du système scolaire. Il est donc nécessaire de poursuivre un travail de sensibilisation donnant une part importante aux échanges et dialogues avec toutes les parties prenantes.

Le rapport conclut sur le fait que l’augmentation du nombre d’appareils mobiles et de leurs fonctionnalités est une tendance qui restera à la hausse dans les prochaines années. Le potentiel des technologies mobiles en matière d’accès à l’information et d’éducation est réel et c’est pourquoi l’UNESCO estime que les décideurs doivent accorder la plus grande attention à l’apprentissage mobile (p.40).

Synthèse : JTT

Mettre en marche l’apprentissage mobile, thèmes généraux (2013)

UNESCO. (Éd.). (2012c). Mettre en marche l’apprentissage mobile, thèmes généraux.
Consulté le 03/01/14, à l’adresse :
http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002164/216451f.pdf

Le discours institutionnel se caractérise ici par une dimension prophétique : il s’avère annonciateur de bouleversements rapides en éducation à condition d’une expansion des utilisations des appareils mobiles en apprentissage. Cette nouvelle génération de technologies est décrite comme une remplaçante potentiellement plus performante que les précédentes : elle parviendrait à résoudre les tensions que les autres n’ont pas pu résorber. Les promesses des technologies mobiles sont ainsi vivement défendues via des tournures prédictives modalisées par de nombreux adverbes d’intensité.

Cette publication compte dix-sept pages, organisées en cinq parties3. Au plan des faits dont le relevé peut être utile à l’élaboration de projets pérennes, on présentera en premier lieu les faits relatifs aux écarts en termes de moyens financiers, matériels et humains.

Les coûts d’abonnements en téléphonie mobile restent très élevés dans les régions pauvres du monde4. Quand bien même les personnes peuvent investir, les types d’appareils mobiles acquis s’avèrent très différents, notamment en termes de puissance et de robustesse. Au plan des utilisations de la téléphonie dite « de troisième génération », des écarts importants sont aussi identifiés : « en Amérique latine, par exemple, moins de 5 % de la population accédait à l’internet depuis un appareil mobile en 2009, contre 47 % des habitants dans les pays membres de l’OCDE […] » (p. 14). Malgré ces faits, il est relevé, un peu plus loin dans le document, qu’en Afrique, vingt fois plus de gens se connectent à Internet via leur mobile que via un ordinateur.

Suite à ces considérations relatives aux spécificités des contextes, on peut présenter deux tensions importantes expliquant le lent développement de politiques publiques en faveur des utilisations éducatives de technologies mobiles. La première d’entre elle réside dans les difficultés à contrôler ces appareils : les printemps arabes de 2011 sont cités dans le document (mais bien après l’identification de cette tension). La deuxième concerne, quant à elle, la confusion, au sein des politiques publiques, entre accès et apprentissage5.

Des représentations négatives des technologies mobiles peuvent également gêner le développement des politiques publiques. La petite taille de ces machines, le fait qu’une importante part des ressources développées aient des visées ludiques, le risque d’addiction, d’exposition à des informations violentes ou d’isolement social peuvent nuire à l’impulsion de programmes de déploiement des technologies mobiles. Plusieurs projets menés à l’international permettent de discuter ces représentations sociales6. Parmi ceux cités dans tout le document, on pourrait distinguer des projets à visées « classiques »7 d’autres, plus « originaux »8, notamment parce qu’ils considèrent des acteurs des systèmes éducatifs différents des élèves ou des enseignants ou encore des temps d’apprentissages comme ceux de l’évaluation. Les projets cités dans le document ne sont cependant ni décrits ni évalués en détail. Certains visent plus particulièrement la formation de populations marginalisées9.

Le déploiement de technologies incite à considérer des « écosystèmes plus vastes et plus variés que ceux qu’on trouve généralement dans l’éducation » (p. 15) : il s’agit de réguler et de coordonner des systèmes d’activités visant des objectifs et des buts partiellement partagés. Les entreprises qui installent les systèmes de télécommunications, les opérateurs et fabricants d’appareils devraient être impliqués dans les débats qui animent les communautés éducatives.

Des besoins importants en termes de coordination sont détectés : les chercheurs ont certainement, ici, une place importante à prendre afin que « des parties prenantes diverses, chacune avec ses intérêts et ses besoins particuliers, travaillent ensemble vers des objectifs communs » (p. 15). Un appel en direction des gouvernements, afin qu’ils entretiennent leur rôle de leadership fort et visionnaire, est également lancé et présenté comme un « ingrédient » essentiel à la pérennité des projets.

Synthèse : AB

L’apprentissage mobile pour les enseignants, thèmes généraux (2012)

UNESCO. (Éd.). (2012b). L’apprentissage mobile pour les enseignants. Thèmes généraux.
Consulté le 03/01/14, à l’adresse :
http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002164/216451f.pdf

Dans ce document, l’aspect prophétique du discours est moindre que dans le précédent : s’il présente également une « multitude de projets » qui peuvent préfigurer « la façon dont les appareils mobiles […] bouleverseront et amélioreront l’éducation à l’avenir » (p. 8), les tournures verbales sont davantage marquées par le conditionnel et les adverbes employés ont plutôt des valeurs hypothétiques. La publication comprend vingt-cinq pages organisées en trois grandes parties10. On relève que l’articulation de la partie centrale se base sur un schéma récurent : un ou des principes sont énoncés, suivis de plusieurs exemples d’expérimentations, décrites et évaluées de manière synthétique.

La première partie présente des données quantitatives au sujet des besoins considérables de recrutement d’enseignants, ne serait-ce que pour l’éducation primaire universelle. En Afrique, les besoins sont vifs : il faudrait doubler ou tripler voire, parfois, quadrupler les effectifs actuels d’enseignants. Il est précisé que les besoins concernent « avant tout les pays et les communautés déjà en proie à d’autres difficultés (taux de chômage élevé, pauvreté, [etc.]) » (p.6).

À ces besoins quantifiés s’ajoutent des besoins d’améliorations des formations en général11. De plus, les conditions de travail des enseignants sont, en général, assez difficiles : rémunérations basses au regard de la charge et de la responsabilité des tâches, manques et faiblesses des formations continues, peu voire pas d’appui de la part des administrateurs. Des espoirs sont formulés quant au potentiel des technologies mobiles face à ces enjeux pour l’éducation et la formation.

La partie centrale organise une description de ce potentiel en commençant par préciser que les téléphones mobiles sont répandus « jusque dans les régions où les ordinateurs et les établissements de formation des maîtres sont rares » (p. 8)12. Un aspect important de leur potentiel renvoie à la facilitation d’accès aux informations qu’ils favorisent : un projet au Pakistan13, celui nommé Boat School au Bangladesh14, le projet Bloom15 concernant plusieurs pays de l’Union Européenne et l’utilisation de smartphones pour les étudiants en médecine de l’université de Leeds au Royaume-Uni16 l’illustrent. L’analyse est enrichie par l’observation d’effets bénéfiques inattendus17. Il est remarqué que cette facilitation de l’accès aux informations n’a jamais été aussi importante, ce qui est mis en relation avec les spécificités des technologies mobiles : coût moindre, portabilité et utilisations déjà banalisées socialement.

La facilitation de l’accès aux informations est ensuite décrite pour ce qui relève des contenus18 : il est mentionné que ceux élaborés pour les mobiles sont encore rudimentaires19 au plan technique20 mais aussi pédagogique puisqu’ils fonctionnent principalement à partir d’une méthode déductive (explication suivie d’exercices de répétition). Une piste à suivre pourrait consister en un  développement d’interfaces favorisant la création d’activités par les enseignants eux-mêmes21 même si les smartphones restent limités par leurs caractéristiques tout comme l’obsolescence rapide des différents modèles.

Un autre intérêt de la téléphonie mobile renvoie à la valorisation de l’agentivité des enseignants : l’intégration de technologies mobiles en éducation, loin de les « remplacer », réclame qu’ils aient davantage de compétences. Ici, le projet Text2Teach, réalisé aux Philippines, est cité en tant qu’exemple puisqu’il tient réellement compte de l’accompagnement des enseignants, par opposition à un certain nombre d’autres expérimentations. Une qualité du projet est soulignée en ce qui concerne la gestion de l’activité complexe qu’est l’enseignement : « le projet cherche à rendre les enseignants plus efficaces mais aussi à alléger leur charge de travail, et non l’inverse » (p.15).

La dernière partie présente un ensemble de préconisations adressées aux responsables politiques dont on retient la sélection suivante : les technologies mobiles sont moins coûteuses que les ordinateurs et peuvent également questionner le modèle 1 (apprenant) : 1 (machine) ; il conviendrait de choisir des technologies adaptées aux contextes et aux objectifs (même si elles sont « low-tech ») et de cibler des populations défavorisées plutôt que celles qui ont déjà accès aux TIC ; la valorisation, voire la reconnaissance institutionnelle des communautés professionnelles en ligne appuierait l’implication des enseignants ; le financement des projets devrait favoriser leur pérennisation et leur déploiement.

Synthèse : AB

L’apprentissage mobile et les politiques (2012)

UNESCO. (Éd.). (2012a). L’apprentissage mobile et les politiques : questions clés.
Consulté le 03/01/14, à l’adresse :
http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002164/216451f.pdf

Dans cette publication, la dimension prophétique du discours est complétée par une dimension politique forte et explicite dès le titre. Le document compte soixante-et-une pages organisées en huit parties principales. Au plan définitoire, il est précisé ce qui est entendu par « technologies mobiles » : force est de constater qu’elles renvoient à une multiplicité d’appareils posant des problèmes d’interopérabilité. Ils peuvent être rassemblés par des traits communs : leurs caractères informatique, faciles à transporter / facilité de transport ainsi qu’un certains nombre de fonctionnalités permettant, entre autres, « la communication, le stockage de données, les enregistrements audio et vidéo, la géolocalisation, etc. » (p. 11). Les apprentissages mobiles sont caractérisés par le fait qu’ils peuvent se produire à tout moment et en tout lieu ; ils concernent donc aussi les temps de classe.

L’expansion rapide du marché de la téléphonie mobile, notamment en Afrique22 est pointée comme un fait majeur pour le développement des apprentissages mobiles23. Dans ce document, la question de la gestion des déchets électroniques n’est pas élidée : les besoins de politiques et de législations spécifiques pour cela sont décrits24. Malgré ces questions vives, les projets expérimentaux qui ont cours depuis le début des années 2000 ont permis d’accumuler un certain nombre d’indicateurs du potentiel de ces technologies, qu’il s’agisse de l’appui aux enseignants (projet au Mozambique), d’alphabétisation (projets au Pakistan et au Niger), de motiver les apprentissages (projet d’Afrique du Sud), de renforcer la communication entre acteurs de l’éducation (projet au Kenya) ou d’améliorer les systèmes de gestion des apprentissages (Mongolie).

Pour soutenir la visée et les apports de ces projets, il est notamment recommandé aux gouvernements de promouvoir le développement des Ressources Educatives Libres (REL) et plus particulièrement de celles prenant en charge les langues locales. Il conviendrait aussi de considérer « l’apprentissage formel, informel et non formel comme également valides et valables » (p. 35). Axer des projets en direction des groupes vulnérables et marginalisés, parmi lesquels les femmes, les filles et les personnes handicapées constitue aussi une préconisation forte.

Des obstacles d’ordre technique, pédagogique, économique, social et représentationnel s’avèrent cependant importants. S’y ajoutent les interdictions, encore répandues de par le monde, d’utilisations d’appareils mobiles dans les écoles : ces interdits sont présentés comme un frein à l’innovation pédagogique. Il est intéressant de relever que les apprentissages mobiles posent des problèmes de contrôle et que, contrairement aux programmations politiques antérieures, les apprentissages mobiles se caractérisent par une dynamique « bottom-up ».

Au plan infrastructurel, on relève que l’accès à Internet haut débit a été présenté à plusieurs reprises durant la dernière décennie comme un droit légal25. Sur ce point, le développement de la connectivité via la technologie wifi, 3G et 4G favorise un « accès universel même dans les zones dépourvues de l’infrastructure nécessaire à l’Internet à ligne fixe » (p. 23). La question de la diminution des coûts d’accès et de l’implication des états pour cela est décrite dans le document26. Il convient de souligner que les TIC ont intégré la majorité des programmes éducatifs, bien qu’ils puissent privilégier une approche technocentrée27.

Les politiques éducatives visant l’utilisation de TIC en éducation se sont développées à une « époque pré-mobile » (p. 9) : un appel est donc lancé, via cette publication, afin que les gouvernements actualisent leurs politiques afin d’inclure les apprentissages mobiles. Les appareils mobiles sont présentés comme des compléments, ayant une pertinence qu’il est possible de délimiter par rapport à celles d’autres TIC : il est préconisé de cibler ces « zones de pertinence »28 de chaque technologie et de situer, pour chaque contexte, les possibilités d’introduction de nouveaux instruments au regard d’ « un continuum de maturité de l’utilisation des TIC dans l’éducation » (p. 17).

Pour encourager les développements des apprentissages mobiles, il est montré qu’ils peuvent favoriser un réaménagement des investissements : les coûts investis notamment pour le démarrage de projets et concernant fréquemment l’équipement des participants avec des ordinateurs personnels, peuvent être déplacés, notamment du fait de l’équipement pré-existant des personnes, vers l’investissement pour le haut débit, l’offre de formations continues ou la production de contenus. Il est cependant nécessaire d’assurer l’accès équitable de tous aux contenus29. Les services de l’informatique en nuage peuvent aussi permettre de réduire les coûts internes via des transferts à des serveurs tiers. Malgré cela, il est montré que peu de projets dépassent la phase expérimentale : une révision de la gestion budgétaire est à mettre en oeuvre afin que ces projets se pérennisent30.

Finalement, deux questions liées paraissent très vives : en premier lieu, celle de la coopération entre communautés d’acteurs et au sujet de laquelle, les gouvernements devraient prendre une responsabilité centrale pour, entre autres, la coordination des politiques locales et nationales. La seconde question vive nous semble liée dans le sens où les organisations impliquées dans le développement des apprentissages mobiles ne sont jamais considérées, en elles-mêmes, comme des organisations apprenantes, notamment en ce qui concerne la coopération pour la redéfinition d’objectifs communs. Ici, c’est le rôle des chercheurs qui parait important : certaines méthodologies (voir : Engeström, 2011) permettent en effet de renforcer les capacités d’apprentissages des organisations.

Synthèse : AB

1 Bring Your Own Technology – BYOT, One Laptop Per Child – OLPC.

2 « Les solutions d’apprentissage mobile devrait s’avérer particulièrement bénéfiques aux établissements censés accueillir des jeunes et des adultes qui, pour des raisons physiques, sociales ou économiques, ne peuvent assister régulièrement aux cours de type formel », (p. 35).

3 L’image négative de l’apprentissage mobile ; l’ouverture lente des politiques éducatives à sa considération ; le potentiel de ces objets pour l’accès à l’éducation des populations marginalisées ; les questions d’accès et d’équité ; la diversification des partenariats.

4 « En moyenne, les Africains dépensent 17 % de leur salaire mensuel en souscriptions mobiles, alors que les dépenses des habitants de pays plus riches sont plus proches de 1,5% » (p. 13).

5 « Divers projets de connectivité s’érigent haut et fort en promoteurs de l’éducation, et rares sont pourtant ceux qui précisent comment les élèves, les écoles et les membres communautaires vont pouvoir et devraient utiliser ce nouvel accès électronique »(p. 12).

6 Des développements d’applications éducatives, notamment en Corée du Sud à Singapour ou au Chili ; des utilisations partant d’approches pédagogiques collaboratives en Amérique Latine et en Afrique ; des programmes de prévention des comportements à risque, notamment en Amérique du Nord.

7 Applications de type SMS pour la gestion de la vie scolaire de l’Ouganda aux États-Unis ; universités ouvertes des Philippines, du Royaume-Uni et du Chili.

8 Dotation en smartphones des inspecteurs de la province de Mendoza en Argentine pour la coordination et l’aide à la prise de décisions ; des évaluations sur mobiles au Paraguay.

9ABC au Niger pour l’alphabétisation des adultes dans des dialectes locaux, M4girls en Afrique du Sud pour l’apprentissage des mathématiques, plusieurs projets pour l’apprentissage de l’anglais en Inde, Mongolie et au Bangladesh, des investissements qui s’orientent vers les technologies mobiles plutôt que vers les ordinateurs en Colombie pour des visées d’alphabétisation.

10 Un état de la crise mondiale au sujet des besoins d’enseignants (et pour les enseignants en poste) ; certains résultats issus des projets relatifs aux apprentissages mobiles au regard des défis posés par cette crise et en termes de prospective afin d’améliorer les pratiques éducatives ; une série de considérations adressées aux responsables politiques.

11 « Il ressort des données réunies par les Nations Unies que partout dans le monde, beaucoup d’enseignants travaillent sans les qualifications ou la préparation requises pour répondre aux besoins éducatifs du XXIe siècle » (p.6).

12 Il est relevé qu’en Afrique, la dernière technologie à avoir connu un essor aussi important que le téléphone portable était l’AK-47.

13 Suite à une formation d’alphabétisation en présentiel, l’envoi de SMS aux apprenants permettait la mémorisation et la consolidation des acquis.

14 Il visait la formation de 87 000 familles vivant dans des communautés marginalisées via les téléphones portables, ce qui les a relié à la société de l’information.

15 Il s’agissait de former les professionnels du secteur des transports ne pouvant assister à des cours classiques du fait d’horaires irréguliers.

16 Des évaluations et le tutorat via des téléphones intelligents permettaient de concilier les cours, la communication avec les enseignants et les expériences de terrain.

17 Sentiments d’autonomie des femmes ; pratiques d’enseignement-apprentissages trans générationnelles ; sur-implication d’apprenants engagés dans des dispositifs intégrant des TIC.

18 Le développement de banques de ressources éducatives validées, notamment au Mozambique et aux États-Unis, est mentionné.

19 Deux aspects sont analysés :l’appui au tutorat en formation initiale via un gain de temps (moins de déplacement) et l’utilisation de capsules vidéo, ainsi que l’intérêt pour les enseignants de pouvoir s’inscrire et participer aux échanges de communautés professionnelles en ligne.

20 L’interactivité se réduit généralement au signalement de la réussite ou de l’erreur.

21 « Il incombe donc aux concepteurs de faciliter la tâche des éducateurs et de leur permettre d’adapter les contenus numériques sans devoir utiliser un code dans des langages de balisage comme HTML (HyperText Markup Language) » (p. 19).

22 « la libéralisation de plus en plus grande de l’industrie des télécommunications et la déréglementation de la téléphonie mobile ont servi de moteur à la croissance explosive de la pénétration du mobile en Afrique et au Moyen-Orient, principalement en abaissant les prix et en développant l’accès », (p. 29).

23 Les données relatives aux spécificités des téléphones mobiles utilisés en précisent toutefois certaines limites : « À dire vrai, […] rares sont ceux qui ont accès à des smartphones et à la large bande mobile. Entre les pays et à l’intérieur des pays, il existe des inégalités quant aux types d’appareils disponibles, au pouvoir d’achat et aux niveaux d’alphabétisme des usagers, ainsi qu’à l’accès à l’électricité et à l’infrastructure du mobile » (p. 17).

24 Notamment du fait de leur augmentation exponentielle de 40 millions de tonnes par an, voir p. 27 du document.

25 Sur ce point, c’est en 2007 que l’idée a été émise en Afrique du Sud ; trois ans après, la Finlande inscrivait l’accès à internet à haut débit au sein de ses cadres législatifs.

26 « Là où c’est approprié, les responsables de l’élaboration des politiques d’apprentissage mobile devraient envisager d’étendre la définition de l’accès à l’Internet pour qu’elle comprenne non seulement les connexions par ligne fixe mais aussi les services mobiles haut débit. […] Permettre un accès gratuit ou à tarif réduit aux portails éducatifs via les réseaux mobiles, en utilisant un tarif mobile spécial ou un programme similaire de subvention, appuiera l’apprentissage mobile. De plus, des tarifs réduits pour les services vocaux et les SMS encourageront encore la mise en place de services éducatifs optimisés pour les technologies mobiles » (p. 30).

27 « En Afrique, par exemple, 51 pays sur 54 ont une forme ou une autre de politique d’utilisation des TIC dans l’éducation (Bassi, 2011). Souvent, ces politiques sont axées sur la technologie – matériels, logiciels, mise en réseau, contenus – et non sur sa relation avec la pédagogie, le programme d’enseignement ou l’évaluation »(p. 12).

28 « Par exemple, dans une zone présentant une forte infrastructure de données mobiles, des coûts de données abordables et des téléphones donnant accès à l’Internet, l’accès à des ressources en ligne offre des possibilités notables à l’apprentissage mobile. Dans d’autres pays, les solutions passant par la voix, les SMS et même Bluetooth peuvent être plus appropriées. Ces solutions plus simples peuvent être tout aussi puissantes en termes de communication et de soutien administratif que les stratégies fondées sur les smartphones ou les tablettes » (p. 17).

29 Sur ce point, le portail du mobile Molly développé par l’Université d’Oxford, au Royaume-Uni est cité en exemple (voir p. 18 du document).

30 Voir notamment p. 31 du document.